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Le Maître des insectes de Stuart PREBBLE

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Le Maître des insectes
de Stuart PREBBLE,
traduit par Caroline Bouet
Denoël (Suspense),
2015, p. 350

Première Publication : 2015

Pour l’acheter : Le Maître des insectes

Stuart Prebble est né en 1951. Il a travaillé à la télévision britannique en tant que journaliste et producteur pendant plus de trente-cinq ans. Il dirige maintenant sa propre société de production. Le Maître des insectes est son premier roman traduit en France.

♣ ♣ ♣

Londres, années 1960. Quand Jonathan Maguire émerge d’un mauvais sommeil sur le sol du salon, il a les mains couvertes de sang et le corps de sa femme Harriet gît à ses côtés. Seule lui revient à l’esprit une violente dispute avec cette dernière, qu’il soupçonnait d’infidélité. Jonathan est le tuteur de son grand frère Roger, dont le handicap mental l’empêche d’être autonome et qui consacre tout son temps libre à un étrange et spectaculaire élevage d’insectes.
Anéanti par la mort de sa jeune épouse, Jonathan est néanmoins déterminé à échapper à la police, terrifié à l’idée que s’il était arrêté pour meurtre, Roger serait placé dans une institution. Jonathan a sacrifié trop de choses, y compris son mariage, pour accepter cette éventualité. Lui seul peut protéger Roger, à la fois incapable d’exprimer sa pensée et terriblement lucide quand il s’occupe de ses milliers de créatures grouillantes.

Avec un tel titre, une telle couverture et un tel synopsis, Le Maître des insectes avait tout pour me plaire ou au moins tout pour m’intriguer. J’ai profité du long week end de Pâques pour me plonger totalement dans cette lecture et je ne regrette pas ma découverte.
J’ai certes été un peu surprise du chemin emprunté par la narration mais j’ai été séduite par le traitement des personnages et par la plume. C’est un roman que l’on dévore d’un bout à l’autre, totalement happé par les événements !

La quatrième de couverture nous annonce un meurtre. De ce fait, j’étais persuadée, en parcourant la première ligne, que le texte commencerait sinon à ce moment-là, au moins quelques heures/jours après, au moment du départ de l’enquête. Je pensais presque que je découvrirais l’histoire du point de vue des enquêteurs, un peu comme avec les séries policières que j’affectionne. Et en fait, pas du tout. Mais pas du tout, du tout. Outre le prologue qui semble complètement sorti de nulle part (on ne le comprends qu’à la toute fin de la lecture, mais j’y reviendrai plus tard), le premier chapitre nous fait faire un bond dans le temps, en arrière, puisqu’il nous présente l’enfance du narrateur, le fameux Jonathan dont on nous parle dans le résumé. Ce héros-Monsieur-tout-le-monde, nous raconte sa vie et notamment la relation très particulière qu’il entretient depuis toujours avec Roger, son frère aîné handicapé. Le meurtre que l’on s’attendait à voir dès le début n’apparaît qu’aux environs de la page 200, suite à une présentation très chronologique des faits.
Le choix est surprenant sur le coup mais il est finalement assez logique, particulièrement intéressant et finalement expliqué par le narrateur lui-même dans les dernières pages. Il était plus clair, selon lui, de retracer son histoire dans l’ordre des événements et je lui donne parfaitement raison. Ce choix permet également d’entrer pleinement dans la vie des personnages dès leur plus jeune âge et donc de s’attacher à eux, de comprendre leurs choix et leurs réactions. L’événement horrible qui finit par arriver n’est donc pas perçu de la même façon par le lecteur, ce qui révèle tout l’intérêt de ce choix de narration.

Stuart Prebble nous offre des portraits très précis, très fouillés. Jonathan en premier, évidemment, puisqu’il s’agit du narrateur et que l’on découvre toute l’histoire à travers ses yeux. Le lecteur fait donc connaissance avec lui dès le premier chapitre (et non le prologue) et le voit évoluer au fil des pages (donc des années). Difficile de ne pas comprendre ses agissements et ses sentiments alors que nous sommes dans sa tête pendant 350 pages. Le lecteur s’implique, c’est le moins que l’on puisse dire. L’histoire n’en est que plus intense et on attend le dénouement impatiemment, curieux d’avoir le fin mot de l’histoire.
Roger, le frère aîné, est un mystère pour tous. Atteint d’un handicap mental qui semble le laisser constamment à l’âge de 8 ans, l’adolescent puis l’homme n’en possède pas moins un esprit brillant et bien réfléchi. Derrière le visage imperturbable, les rouages du cerveau s’actionnent, de façon différente, certes, mais tout de même. C’est ainsi que Roger met entièrement au point un insectarium dont il est le dieu ultime. Il installe, nourrit, soigne mais n’hésite pas à éliminer lorsqu’il le faut fourmis, blattes, araignées… tout ce petit monde bien rangé dont il prend un soin maniaque et qui occupe plusieurs heures de son quotidien. Et l’insectarium va finir par se retrouver au centre de toutes les attentions et de tous les développements de l’histoire.
Troisième membre du trio et non des moindres : Harriet, la future victime. Femme adorée, soutien sans faille, amie attentionnée… mais aussi étudiante en musique ayant une vie assez chargée en dehors des deux frères. Très entourée par la gente masculine, notamment d’un certain Brendan qui ne cache ni ses sentiments ni ses intentions envers elle… Voilà de quoi inquiéter Jonathan et assombrir le tableau familial qui semblait jusque là si parfait.

stuart prebblePlus que l’histoire d’un meurtre et donc de l’enquête qui en découle, c’est surtout l’histoire d’histoires d’amour. L’amour passionné qui unit évidemment les deux jeunes mariés Harriet et Jonathan mais aussi et surtout l’amour fraternel très fort qui existe entre Roger et son petit frère. Les deux enfants, adolescents puis hommes sont liés et se serrent les coudes, quelle que soit la situation, quelles que soient les difficultés et les conséquences. Et malgré les années qui passent, rien ne change ; au contraire, les liens se renforcent. C’est émouvant.

Les révélations des dernières pages du journal de Jonathan sont assez attendues… en tout cas, j’avais deviné que l’explication des mystères allait dans ce sens. Malgré tout, ce n’est pas un problème du tout puisqu’il pouvait difficilement en être autrement.
En revanche, lorsqu’on relit le prologue qui nous semblait bien nébuleux au départ, après avoir dévoré le livre ; il prend enfin tout son sens et nous laisse avec un « Bien joué Monsieur Stuart Prebble ! » sur les lèvres.

Passée la surprise de la direction choisie par Stuart Prebble pour mener son intrigue, j’ai savouré cette histoire de drame familial et surtout cette relation fraternelle si touchante. L’auteur nous offre un « témoignage » (qui reste de la fiction) extrêmement bien écrit et particulièrement marquant. Un nom à suivre !

Merci à Célia pour sa confiance renouvelée !

Illustration : Portrait de l’auteur trouvé sur son site !


Classé dans:♣ Sur les étagères..., ¤ Meurtres et enquêtes, Policier Tagged: denoël, sp, stuart prebble

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